Meilleur sommelier du monde : l'histoire des vainqueurs pour la France - épisode 4 - Serge Dubs

Publié le par Jean Bernard

Serge Dubs version 1989 avec sa médaille mondiale. (Photo DR)

Serge Dubs version 1989 avec sa médaille mondiale. (Photo DR)

Le podium final en 1989 avec, de gauche à droite, Eddy Furlan (Italie), Serge Dubs et Marc Wattier (Belgique). (Photo DR)

Le podium final en 1989 avec, de gauche à droite, Eddy Furlan (Italie), Serge Dubs et Marc Wattier (Belgique). (Photo DR)

Sous la flèche, on aperçoit Gérard Basset. (Photos DR)
Sous la flèche, on aperçoit Gérard Basset. (Photos DR)Sous la flèche, on aperçoit Gérard Basset. (Photos DR)

Sous la flèche, on aperçoit Gérard Basset. (Photos DR)

Depuis 1989, toujours soutenu par Béatrice son épouse, Serge Dubs est demeuré très présent dans le monde des concours internationaux. (Photos JB)
Depuis 1989, toujours soutenu par Béatrice son épouse, Serge Dubs est demeuré très présent dans le monde des concours internationaux. (Photos JB)
Depuis 1989, toujours soutenu par Béatrice son épouse, Serge Dubs est demeuré très présent dans le monde des concours internationaux. (Photos JB)
Depuis 1989, toujours soutenu par Béatrice son épouse, Serge Dubs est demeuré très présent dans le monde des concours internationaux. (Photos JB)
Depuis 1989, toujours soutenu par Béatrice son épouse, Serge Dubs est demeuré très présent dans le monde des concours internationaux. (Photos JB)

Depuis 1989, toujours soutenu par Béatrice son épouse, Serge Dubs est demeuré très présent dans le monde des concours internationaux. (Photos JB)

1989 : Serge Dubs un Alsacien abreuvé à l'esprit de compétition

Il y a trente-trois ans, à Paris, l'Alsacien se hissait sur le toit du monde quelques mois après avoir remporté la première édition du Trophée Ruinart du Meilleur sommelier d'Europe puis du Master of Port. Une performance préparée comme un sportif...

« Lorsque Jean-Marie Stoeckel (Meilleur sommelier de France 1972) est arrivé à L'Auberge de l'Ill, moi qui ne connaissais rien au vin, je comprenais la manière dont il en parlait. Ce fut sans doute un déclic... » Et voilà comment Serge Dubs, alors tout fraîchement en poste comme chef de rang, a commencé à s'intéresser au vin. « Moi qui n'avait pas fait d'études supérieures, je me suis dit que m'orienter vers la sommellerie pourrait me permettre de voyager et de découvrir le monde. Ce qui était un de mes rêves ! »

Dans le riche vignoble alsacien puis à travers la France, il rencontre, déguste et voit naître en lui un autre désir. « J'ai beaucoup pratiqué le sport et la notion de compétition de manquait. J'ai donc envisagé les concours de sommellerie comme un moyen de combler ce vide. » Compétiteur et surtout gagneur, Serge Dubs est à deux reprises finaliste du Meilleur sommelier de France. En 1978 il est le dauphin de Philippe Bourguignon et deux ans plus tard celui de Georges Pertuiset. En 1983 il monte enfin sur la plus haute marche du podium. « J'étais vexé d'avoir fini second et j'avais mis en place un vrai travail préparatoire pour la finale. Il s'agissait notamment de bien gérer le stress et de savoir oublier ma présence sur une scène afin d'être tout simplement le sommelier qui, chaque jour dans le restaurant, dispute une compétition qui dure quatre heures à chaque service. »

L'homme des premières éditions

En cette année 1983, il ne se contente pas de l'aura naissante qui accompagne son titre. La médiatisation qui entoure le succès mondial de Jean-Luc Pouteau l'incite à s'intéresser à la dimension internationale des concours. Et sa première participation à la sélection française, deux ans plus tard, va lui servir de bonne leçon pour la suite. « Le rendez-vous était fixé à Paris le jour de mon retour d'un séjour à New-York et je pensais que je serais capable de gérer tout à la fois fatigue du voyage, le décalage horaire et le stress de cette compétition. J'ai payé tout cela par excès d'assurance. Ce fut une grande souffrance de ne pas obtenir ma place pour le concours au Portugal ainsi que le meilleur des apprentissages... »

Serge Dubs organise à partir de là son propre coaching, abordant chaque concours comme une épreuve sportive. « Mais j'avais également le sentiment de préparer les examens scolaires que je n'ai pas vécus... » Une démarche personnelle qui a porté ses fruits en octobre 1988 à Reims. Pour la première édition du Trophée Ruinart Europe, Serge Dubs s'impose. Et dans la foulée, il inaugure aussi le palmarès du Master of Port, à Paris cette fois. « Ces concours, je les avais envisagés plutôt comme des préparations car inconsciemment, je m'étais programmé pour le Mondial 1989 organisé en France. Et pendant un an, soutenu par Béatrice, j'ai tout sacrifié. Je ne dormais que quatre heures par nuit et ne vivais que pour mon métier et la perspective de l'épreuve. »

Trop concentré pour avoir des souvenirs

Ce sixième rendez-vous planétaire fut organisé de manière exceptionnelle afin de marquer les esprits et la mémoire des participants. Moët & Chandon n'avait pas hésité à affréter un avion pour permettre aux délégations officielles de découvrir les vignobles de France en un minimum de temps. Une expérience que le sommelier de L'Auberge de l'Ill n'a pas eu l'occasion de savourer. « Pour moi, c'est une page blanche. Je travaillais et je savais que je ne pouvais pas partir quatre ou cinq jours en plus du concours. Bien entendu, je le regrette et c'est pour cela que je dis qu'un candidat qui ne profite pas de tout ce qui entoure le concours se tire d'une certaine façon une balle dans le pied ! »

Du concours en lui-même, le vainqueur ne conserve pas vraiment de souvenirs. Et pour rappeler les noms de ses adversaires en finale il doit même se plonger dans les articles précieusement conservés. « Ce sont plutôt des images globales mais pas de détails. Il faut dire que j'étais vraiment concentré sur l'instant présent et la sélection écrite qui décidait de tout. » Malgré tout il n'a pas oublié être arrivé la veille du début des épreuves pour participer à une rencontre avec des vignerons organisée au Cirque d'hiver.

« J'écoutais les consignes et je les exécutais »

Cette place en finale, son premier objectif, ils seront cinq à l'obtenir. Une concurrence venue de Belgique (Marc Wattier), d'Italie (Eddy Furlan), de Norvège (Christopher Moestue) et du Portugal (Octavio Martins Ferreira). Pour tous, à nouveau au Cirque d'hiver, le chemin pouvant conduire au titre devait durer 40 minutes et débuter par une dégustation à l'aveugle de cinq boissons. Et comme les organisateurs avaient décidé de surprendre, un chardonnay californien côtoyait un Suntory, un Saint-Nicolas-de-Bourgueil, un Terra de Alornas et... un verre d'eau sucrée !

Suivait l'atelier de service avec la décantation d'un vin rouge pour un couple de clients et une proposition d'accords mets-vins dans le cadre d'un menu découvert trente minutes plus tôt. « Mais pour moi, une fois qualifié, le temps s'est arrêté et une fois sur scène, j'écoutais les consignes et j'exécutais. »

Et dans ce cas précis, Serge Dubs a exécuté en proposant un vin blanc du Piémont avec les ravioles à la truffe blanche, un Puligny-Montrachet 1985 pour accompagner la fricassée de homard au curry, un Pichon-Longueville comtesse de Lalande 1966 pour sublimer le tournedos Rossini puis un Madère sur le gouda et enfin un Sauternes, château Rieussec 1976, avec les îles flottantes. « En quittant la scène, je savais que j'avais fait le maximum et j'ai attendu le verdict à la fois anxieux et confiant... » On connaît la suite avec cette victoire devant Marc Wattier et Eddy Furlan.

Ne pas être prisonnier du titre

La presse alsacienne n'a pas manqué de souligner l'événement dignement fêté avec la famille Haeberlin. « Mais dans mon travail au quotidien, cela n'a rien vraiment changé puisqu'en plus du service j'étais déjà responsable des achats. C'est plutôt le regard des autres à mon égard qui a évolué. Souvent les clients de l'Auberge attendaient d'un champion une forme d'exploit. Mais le travail d'un sommelier n'est pas de briller mais de rendre ses hôtes heureux. Ce que j'ai continué à faire tout simplement. »

Conscient toutefois de l'aura accompagnant son titre, Serge Dubs reconnaît qu'il devait essentiellement apprendre à la gérer une fois à l'extérieur. « Je devais alors la mettre au service des vins d'Alsace et de France lorsque je me retrouvais à l'étranger. Toutefois j'ai toujours pris garde de ne pas devenir prisonnier de ce titre. Je voulais continuer à vivre en tant que Serge Dubs et savoir en tirer profit tout en ne perdant pas mon âme. Face aux nombreuses sollicitations je me suis toujours donné le temps de la réflexion. Et aujourd'hui encore je suis fier d'être devenu Meilleur sommelier du monde tout autant que de ma vision de vivre mon métier depuis le premier jour, en le plaçant sous le signe du partage et de l'amour ! »

A suivre.

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